Sur les traces de Christophe Colomb et de Balboa
- Reni Andcam
- 20 juin 2015
- 3 min de lecture

Direction la jungle luxuriante et grouillante du Darién ...
Un défi d’explorateur depuis des siècles.
Nous partageons notre périple sur les traces de Colomb et de Balboa découvrant après des semaines de marche, ce lac salé qui n’est autre que le Pacifique.
La province souffre d'une réputation de région dangereuse.
Avec la plus vulgaire prudence, le Quai d’Orsay déconseille tout bonnement fortement d’y mettre les pieds.
L'on peut lire notamment : jungle au climat épouvantable, animaux, insectes, plantes, isolement, difficultés d'évacuation, incursions armées de guérilleros, FARC, paramilitaires colombiens, narcotrafiquants, migrants clandestins et bandits qui les dépouillent, serpents venimeux, paludisme résistant, fièvre jaune …
C’est un conseil à méditer, certes, mais les Indiens embera de mes rêves, vivent là-bas et j’avais très envie de les saluer.
Nous prenons le hasard pour guide et la chance pour permis.
Une agence de voyages, fortement contrariée par notre indépendance économique, nous menace de contacter la SENAFRONT et nous promet d'être refoulés à la frontière du darien, sans permis.
Nous passerons les postes frontières sans aucune autorisation écrite de la SENAFRONT.
Les rambos en grande tenue de camouflage et aux puissantes poitrines hardées de kalachnikovs se contentent de nous enregistrer.
Nous voilà dans la seule région des amériques où la mythique panaméricaine qui relie l'Alaska à Ushuaïa s'interrompt.
Règne un parfum de bout du monde et une atmosphère intemporelle.
Nous nous immergeons dans des villages indiens coupés du monde qui vivent en harmonie avec une nature belle et généreuse.
Nous remontons en pirogues creusés dans des troncs d'arbre de longs fleuves boueux environnés d'une végétation luxuriante.
Nous achevons la visite d'un village embera et partons à la rencontre de notre piroguier.
La marée haute n'est pas ponctuelle.
La ramification boueuse est impraticable.
Pas de trace ni de notre piroguier ni de notre pirogue.
Epris d'une mortelle inquiétude, Reynald constate avec effroi que ce dernier est parti sans nous avant de se laisser surprendre.
J'ai peine à y croire.
Peut-être, nous attend-t-il au bout de la ramification, au niveau du fleuve principal qui doit être encore gorgé d'eau !!!!
Nous nous engageons dans les défilés de palétuviers.
la boue nous enracine.
La végétation ne tarde pas à s'étoffer.
Le canal boueux s'est détaché.
Nous sommes perdus.
Rebrousser chemin s'impose rapidement comme une évidence.
Notre piroguier, parti à notre rencontre, nous prend en flagrant délit de scepticisme.
Nous attendrons la marée plusieurs heures inquiétant mortellement notre hôte.
Les poitrines nues s'exhibent timidement.
Autour des huttes rondes, des lattes de bois défendent contre tout regard indiscret.
Le bonheur se déguste audacieusement en communauté.
Nous nous reveillons dans nos tentes comme aux premiers matins du monde.
La chaleur et l'humidité sont étouffantes.
Les orages font vibrer nos sens en éveil.
Nous débarquons à l'improviste.
Comment les joindre pour les prévenir de notre arrivée ?
Dans le plus grand respect de la coutume, nous demandons l'autorisation au noko (chef de la tribu).
Ce dernier souffle dans une corne de bambou ou tape sur un gong.
Les femmes du village se pressent autour de nous et débitent la finesse de leur artisanat.
Les indiens luttent pour vivre avec un revenu qui avoisine le dollar quotidien.
Les problèmes d'eau et d'électricité sont monnaies courantes.
Préservés des dégâts du tourisme de masse, certes, mais aussi privés des revenus que pourraient leur procurer le passage de voyageurs, certains indiens ont fait le choix de vivre dans de nouveaux villages embera, aux portes de la capitale, sur les rives du rio Gatun.
Leur visite s'avèrera complémentaire.
L'authenticité et la timidité du Darien laissent place à l'amical partage des cérémonies et des connaissances ancestrales.
Les hommes nous accueillent en musique.
Les femmes dansent en cercle merveilleusement bien et avec une décence parfaite, au son des flûtes et des tambours.
La joie et les tatouages tribaux sont de sortie.
Armée d'une aiguille, je m'essaie fastidieusement à l'artisanat.
Le shaman du village nous abreuve de connaissances sur les plantes médicinales.
La civilisation moderne a avalé deux de ces enfants.
Une de ses filles, étudiante, a succombé à crise cardiaque.
Un de ses fils, épris de football, s'est pris une balle dans la tête.
A monde déroutant !!!
Quand tu ravales nos certitudes et nous oblige à la nuance !!!
Cam
Comments