Haro sur Belo Monte
- Reni Andcam
- 8 avr. 2016
- 36 min de lecture
Le barrage de Belo Monte sera le 3ème plus grand au monde. Il fait suite à la construction de celui de Jirau, construit sur le fleuve Madeira. Belo Monte va inonder 668 km2 dont 400 km2 de forêt primaire en territoires autochtones. 20 000 personnes vont être déplacées et au moins 24 peuples vont subir un changement de mode de vie lié à la raréfaction de leurs ressources vivrières.
Belo Monte ouvre la voie à d’autres atteintes au poumon vert de notre planète car il représente pour le Brésil non seulement une source d’énergie domestique mais aussi une source d’alimentation pour de nouvelles mines, par exemple la mine d’or de Belo Sun qui a annoncé son ouverture fin 2012.
Sa construction a fait l’objet de nombreuses plaintes à l’échelle nationale et internationale, et a été condamnée à maintes reprises.
Parmi les violations des droits humains perpétrées par le consortium en charge de la construction de Belo Monte, figurent l’absence de consentement libre, préalable et informé des communautés indigènes locales ainsi que la non prise en compte de la présence, à proximité du site du barrage, de groupes d’Indiens isolés extrêmement vulnérables aux contacts extérieurs et qui seront directement affectés par les impacts du projet. Par ailleurs, la destruction de l’environnement que générera le barrage de Jirau aura des répercussions importantes sur les communautés riveraines du bassin du Madeira - partagé par le Brésil, la Bolivie et le Pérou – en inondant les forêts, dévastant les stocks de poissons et détruisant de manière irréversible les moyens de subsistance des populations locales.
Le manque de consultation est l'un des points principaux que l'activiste, Azelene Kaingang, avait espéré adresser au forum permanent de l'ONU sur les questions autochtones en mai 2011 à New York. Kaingang est une sociologue accréditée par le forum, Vice-présidente du comité autochtone d'OAS et a été fonctionnaire de la Fondation nationale de l’Indien (FUNAI) pendant plusieurs années. Quelques jours avant de partir pour l'événement Kaingang a appris qu'elle ne serait pas envoyée au Forum. Dans une entrevue le 6 juin, elle a expliqué pourquoi la FUNAI a empêché son départ et pourquoi elle s'oppose à la construction du barrage de Belo Monte. « La FUNAI est une agence d'un gouvernement (...) qui a peur de la vérité… qui ne veut pas voir la vérité au sujet de Belo Monte » a-t-elle expliqué. « Je m'oppose à ceci, (...) parce que l'état brésilien viole un composant important de son engagement international sur le travail, qui déclare que les peuples autochtones ont le droit d’être consulté une fois affecté par ce type de projet. Je m'oppose à ceci parce que je suis autochtone, parce que je m'oppose à la violence commise contre les peuples autochtones… Je m'oppose à ceci parce que les peuples autochtones font partie de l'Etat brésilien et comme tels doivent être dûment consultés et doivent participer au développement du pays, qui est également à nous. Je m'oppose à ceci parce que l’Etat met en danger les vies et les cultures des peuples autochtones, tout en causant une destruction environnementale sans précédent. »
Kaingang a également noté qu'il était ironique que, tandis que le gouvernement commence une campagne nationale contre la misère « … il appauvrit les autochtones en les forçant à quitter leurs terres et leurs modes de vie traditionnels. »
Les mêmes critiques sont aujourd’hui émises par la communauté internationale vis-à-vis du gouvernement brésilien concernant le barrage de Belo Monte. Il lui est reproché par la Justice fédérale du Para, par la Cour suprême du Brésil, par la CIDH, par l’ONU et enfin par l’OIT d’agir à l’encontre de la Constitution du Brésil, de la Convention américaine des droits de l’homme, de la Convention n°169 de l’OIT et de la Déclaration des Droits des Peuples autochtones. En effet, aucune consultation digne de ce nom, ni aucun consentement ne fut obtenu de la part des populations autochtones concernées par le barrage, aucune mesure préventive ne fut prise en faveur d’une douzaine de tribus dont certaines vivent en autarcie dans le bassin du fleuve Xingu et les études d’impacts environnementaux ont été bâclées.
BELO MONTE : fleuron d'une politique énergétique qui piétine les lois de son pays et les conventions internationales
La politique énergétique de la présidente du Brésil Dilma Rousseff est contraire aux principes constitutionnels du pays mais aussi en totale violation avec les engagements internationaux pris par le Brésil, lui-même. Dans ce contexte, le projet du barrage Belo Monte a fait l’objet de nombreuses critiques d’institutions brésiliennes et internationales.
Le projet a, au départ, été rejeté par l'Institut Brésilien de l'Environnement (IBAMA), puis par le Ministère Public Fédéral, condamné ensuite par la Cour Suprême du Brésil, décrié par l’ONU via le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme et des libertés fondamentales des populations autochtones, puis finalement par la Commission interaméricaine des droits de l’Homme (CIDH) de l'Organisation des États Américains (OEA).
L'IBAMA, chargé de mener les études d'impact, a rejeté à plusieurs reprises les propositions des cartels, jusqu'à devoir céder à la pression du Président de la République brésilien d'alors, Lula Da Silva.
L?équipe technique de l'IBAMA affectée au projet a déclaré tout d?abord qu' « il y a des éléments insuffisants pour attester de la viabilité environnementale du projet » en raison de l'omission de données dans l'EIE. Les données manquantes reposent sur la qualité de l'eau, les indicateurs socio-économiques et les populations de poissons. Des plans fragiles pour atténuer les impacts directs sur les familles riveraines ont été conçues en dernière minute, provoquant de graves divisions au sein de l'agence. Malgré cela, en Février 2010 le chef de l'IBAMA a approuvé l'EIE, par l'octroi provisoire d?une licence environnementale, stipulant que le consortium gagnant les appels d'offres aurait à surveiller les impacts du projet sur une "période d'essai" de six ans. Une façon de reporter le problème...
Le Ministre brésilien de l'Environnement, Carlos Minc, s'est ensuite vu obligé de concéder des délais raccourcis, et l'autorisation préalable à la construction du barrage de Belo Monte a été donnée en janvier 2011, après la démission de plusieurs responsables de l'IBAMA. Le gouvernement de Dilma Rousseff, succédant au Président Lula, a finalement donné son accord final au projet le 1er juin 2011 à Norte Energia SA - NESA permettant le démarrage des travaux dès l'été 2011 en période sèche.
De son côté, le Ministère Public Fédéral a annoncé dès le début qu'il bloquerait par tous les moyens la réalisation de ces barrages. Plusieurs actions en justice en 2010 ont été déposées par 13 organisations de la société civile contre l'IBAMA pour avoir accordé le permis environnemental provisoire sans répondre aux omissions soulevées dans l'évaluation environnementale. Les plaintes, qui avaient été jugées recevables par le Juge fédéral d'Altamira, portaient sur l'absence des données concernant la qualité de l'eau, ce qui est une violation de la résolution environnementale nationale 357 du Conseil (CONAMA), qui établit les normes pour la qualité de l'eau, et l'article 176 de la constitution fédérale brésilienne, qui interdit le développement du potentiel énergétique hydrologique sur les terres autochtones sans répondre aux obligations qui en incombent.
En réponse à cette action, le procureur général de l'Union (AGU) a déposé une procédure administrative contre les procureurs fédéraux. Pour les organisations de défense des droits de l’homme, cela signifie que l'exécutif a utilisé son pouvoir pour intimider ceux qui ont des questions sur la construction du barrage de Belo Monte. Mais le 12 septembre 2011, cette procédure a été rejetée par le Tribunal Fédéral régional d'Altamira redonnant ainsi la compétence judiciaire aux cours fédérales d'Altamira et de Belem,. C’est dans ce cadre que se déroulent les procès de la cour fédérale depuis fin septembre 2011.
Pour rappel, le premier jugement prononcé le 28 septembre 2011 par le juge fédéral d?Altamira interdit au consortium Electrobas/Norte Energia d'altérer le lit du fleuve Xingu, par « l'implantation d'un port, des explosions, la construction de digues, le creusement de canaux ou tout autres travaux qui modifient son cours naturel » fait référence au fait que 80% de la rivière Xingu va être détournée de son lit initial. La quantité de terre qui devra être enlevée pour sa construction sera plus importante que celle enlevée durant la construction du Canal du Panama. La plainte émane de l'Association des éleveurs et exportateurs de poissons ornementaux d'Altamira – ACEPOAT. En revanche, l’ordre de suspension ne concerne pas les travaux d'installation du chantier, ni la construction de logement des travailleurs.
Une deuxième décision de justice était attendue le 17 octobre 2011. Il s'agissait de traiter un recours du Ministère public fédéral - MPF qui conteste le décret autorisant la construction de l'ouvrage. Le MPF reproche aux autorités de n'avoir pas procédé à la "Consultation préalable, libre et informée" des communautés indigènes avant de donner l'autorisation de commencer les travaux. La juge chargée du rapport s'est déclarée favorable à l'annulation du décret.
En revanche, un deuxième juge a fait usage de son "Droit de regard" ce qui a entraîné un ajournement du procès au 26 octobre 2011. Ce jour-là, ce juge, a défendu la validité du décret. Lors de l'audience, une troisième juge, nouvellement nommée au tribunal, a fait, elle aussi, usage de son "Droit de regard", la décision avait été renvoyée au 9 novembre. Cette juge a, elle aussi, défendu la validité du décret. Par deux voix contre une, le tribunal a ainsi tranché dans ce sens. Le Ministère Public Fédéral a déjà annoncé son intention de faire recours devant le Tribunal Suprême Fédéral. L’indépendance des juges est mise en cause.
Une plainte a été déposée par la société civile brésilienne auprès du Rapporteur spécial des Nations Unies sur l’indépendance des juges et des avocats.
Le 19 août 2011 à Genève, le rapporteur spécial des Nations Unies sur l'indépendance des juges et des avocats, Gabriela Knaul, a invité les autorités brésiliennes à prendre une mesure immédiate pour fournir aux juges, aux magistrats, aux procureurs, aux avocats commis d'office et aux avocats des mesures efficaces et appropriées de protection. « Il est grand temps pour que le gouvernement installe un système national de protection afin de permettre à des juges d’assumer leurs fonctions sans crainte pour leur vie, avec intégrité et sécurité, comme pour leurs familles, » a ajouté Mme Knaul. L'appel de l'expert en matière des droits de l'homme survient après l'assassinat du juge Patrícia Lourival Acioli, connu pour son combat contre les bandes criminelles, les escadrons de la mort et les policiers corrompus, et les rapports de menaces de mort contre de nombreux juges. « L'assassinat du juge Acioli est une preuve de l'existence d'un problème grave concernant la protection des juges au Brésil, » a dit Mme Knaul, un juge brésilien elle-même. « Le Conseil National pour la justice a rapporté qu’au moins 69 juges étaient menacés dans tout le pays, alors que les études du Ministère de la Justice ont indiqué que plus de 90 juges sont pour la plupart sur une liste où leur tête est mise à prix. »
BELO MONTE : l'ONU à la rescousse des populations autochtones menacées
Au sein du système de protection des droits de l’homme des Nations Unies, le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme et des libertés fondamentales des populations autochtones, James Anaya, pointait déjà le Brésil dans son rapport du 26 août 2009, présenté en Assemblée Générale.
James Anaya y indiquait que, ayant ratifié la Convention n° 169 de l’Organisation internationale du Travail concernant les peuples indigènes et tribaux dans les pays indépendants et appuyé l’adoption de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, le Gouvernement brésilien doit donner effet aux droits des peuples autochtones conformément aux normes internationales pertinentes.
En outre, le Brésil offrant d’importantes protections constitutionnelles et légales aux peuples autochtones, le Rapporteur spécial observe que de multiples obstacles continuent d’empêcher les peuples autochtones du Brésil de jouir pleinement de leurs droits fondamentaux.
A la suite de ce rapport, dans une lettre en date du 6 avril 2010, le rapporteur spécial, James Anaya, appelle l'attention du gouvernement du Brésil sur deux projets de développement qui affecteront de manière significative les peuples autochtones dans le pays : la construction du barrage de Belo Monte dans l'Etat de Pará, et la dérivation de la rivière Sao Francisco.
Il indique que le barrage de Belo Monte réduirait le niveau d'eau de la rivière, diminuant les ressources de pêche dont les communautés autochtones dépendent. De plus, puisque la rivière est le seul moyen de transport pour les communautés voisines, on s'attend à ce que le barrage contribue également à l'isolement géographique des peuples autochtones du bassin fluvial de Xingu, les privant de ce fait d’un accès aux Services Sociaux. Le changement du niveau de rivière aurait également un impact écologique considérable car il constitue un régulateur écologique important dans la région.
Parallèlement, dans un arrêt non-contraignant daté du 1er Avril 2011, la Commission interaméricaine des droits de l'homme a demandé au Brésil la suspension immédiate de la construction du barrage de Belo Monte et que soit lancé un processus de consultation auprès des populations indigènes. Il est dit : "La CIDH demande au gouvernement brésilien la suspension immédiate du processus d'appel d'offres du projet de centrale hydroélectrique de Belo Monte". Parallèlement, la Commission demande à Brasilia d'adopter des "mesures préventives" en faveur d'une douzaine de tribus indigènes, dont certaines vivent en autarcie dans le bassin du fleuve Xingu, au coeur de la forêt tropicale amazonienne.
Selon la CIDH, "la vie et l'intégrité" de ces peuples seraient "menacées par l'impact de la construction" de ce barrage. "La Commission interaméricaine a prié l'Etat brésilien de mettre en place des processus de consultation, en accord avec ses obligations internationales" comme celles exigées par la Constitution brésilienne, les accords internationaux tels que la Convention américaine des droits de l'homme, la convention 169 de l'Organisation internationale du travail et la déclaration de l'ONU sur les droits des peuples autochtones. Enfin la CIDH demande que ces processus soient "informatifs, de bonne foi, culturellement appropriés et qu'ils aient pour objectif d'arriver à un accord".
En réponse « la présidente du Brésil, Mme Dilma Rousseff, a décidé de suspendre les relations de son gouvernement avec la Commission interaméricaine des droits de l’Homme (CIDH) de l’Organisation des États américains (OÉA)».
Le 3 juin 2011, le Conseil des Droits de l’Homme des Nations Unies a déclaré, par la voix de Marianne Duarte, de Conectas Direitos Humanos, son inquiétude concernant le projet de centrale hydroélectrique Belo Monte, en Amazonie brésilienne, au regard des plaintes déposées par la Commission interaméricaine des droits de l'homme, au sujet du manque de consultations publiques, en particulier avec les groupes indigènes, et les études d’impacts. « L'attitude du gouvernement brésilien, en ignorant l'importance du système régional des droits de l'homme et de ses obligations, a affaibli un des piliers principaux pour la protection internationale des droits de l'homme » a-t-elle ajouté.
Le mouvement Xingu Vivo para Sempre a donc le 16 juin 2011 porté plainte directement auprès de la Cour Interaméricaine des Droits de l'Homme, afin qu’elle condamne formellement le gouvernement brésilien pour violations de ses obligations internationales.
Mais le Brésil n’a pas participé à l’audience fixée par l'Organisation des Etats américains le 27 octobre 2012 à Washington sur la construction polémique du barrage de Belo Monte. « La décision de ne pas comparaître montre la lâcheté du gouvernement qui (...) veut éviter d'être blâmé publiquement », a estimé Mme Andressa Caldas, avocate et directrice de l'ONG Justiça Global.
Lors de son voyage en Europe en septembre 2011, Les membres de Planète Amazone ont accompagné le chef Raoni du peuple Kayapo à Genève afin qu’il rencontre de hauts dignitaires du Haut Commissariat aux droits de l’Homme de l’ONU (HCDC) grâce à l’entremise de la Société pour les peuples menacés - Suisse.
Le Cacique Raoni a aussi pu décider d’une stratégie commune sur les conseils de Planète Amazone avec le chef Almir Narayamoga Surui qui devait aussi rencontrer des représentants de l’OIT, afin que les représentants de la section "Peuples autochtones et minorités" du HCDH et ceux de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) entreprennent une action commune au Brésil pour appuyer la mise en oeuvre des recommandations faites par James Anaya, Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones et pour demander à ce qu’une plainte soit déposée par le Conseil d’administration de l’OIT en vertu du non-respect par le Brésil de l’article 2 de la convention n°169.
La procédure de plainte ne peut pas être déposée par une personne seule. Elle l’est le plus souvent par les syndicats du pays qui sont représentés à l’OIT ou par un membre du Conseil d’administration. À la réception d'une plainte, le Conseil d'administration a la possibilité de nommer une commission d'enquête, composée de trois membres indépendants, qui a pour mission de procéder à un examen approfondi de la plainte pour établir les faits et formuler des recommandations quant aux mesures à prendre pour résoudre les problèmes soulevés.
Suite à cette rencontre, une commission d’enquête au sein de l’OIT a été nommée pour étudier le cas de Belo Monte.
En mars 2012, l’OIT a prié le Brésil de « prendre les mesures nécessaires pour consulter les peuples autochtones concernés sur la construction de l'usine hydroélectrique de Belo Monte, celle-ci risquant d'avoir des effets irréversibles » (articles 6 et 15 de la convention) puis « de transmettre les informations sur les résultats des procédures en cours devant la Commission interaméricaine des droits de l'homme et devant le tribunal fédéral de Pará », qui ont tous deux jugé illégale la construction du barrage.
La conclusion du Rapport de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations de l'Organisation Internationale du Travail est d’une importance capitale car la Convention 169 est un instrument juridique international qui présente des dispositions obligatoires pour la protection des droits des peuples autochtones, dans un esprit de respect de leurs cultures, de leurs styles de vie et de leurs formes traditionnelles d'organisation. Elle met également en place des mécanismes spécifiques que les États doivent utiliser pour remplir leurs obligations à cet égard.
La Convention 169 précise à l'article 2 que les gouvernements doivent assumer la responsabilité de développer des actions coordonnées, avec la participation des peuples autochtones, pour protéger les droits de ceux-ci et garantir le respect de leur intégrité. Ces actions comprennent des mesures pour leur garantir les mêmes droits et opportunités que les autres membres de la société, sur une base d'égalité.
Lorsqu'un pays refuse de donner suite aux recommandations d'une commission d'enquête, le Conseil d'administration peut prendre des mesures en vertu de l'article 33 de la Constitution de l'OIT. Cet article prévoit que « si un Membre quelconque ne se conforme pas dans le délai prescrit aux recommandations éventuellement contenues soit dans le rapport de la commission d'enquête, (…) , le Conseil d'administration pourra recommander à la Conférence telle mesure qui lui paraîtra opportune pour assurer l'exécution de ces recommandations ».
En réponse aux recommandations faites par la commission d’enquête de l’OIT, le Brésil a promis d’agir conformément aux principes de la Convention à l’avenir mais annonce ne pas vouloir revenir sur les procédures et les décisions prises concernant le chantier de Belo Monte ainsi que celui de Jiraù, tous deux situés en Amazonie brésilienne.
Les nombreux opposants au projet Belo Monte attendent la réaction de l’OIT face à ces déclarations.
« Le Xingu peut se transformer en fleuve de sang », promettent les Kayapo, Xipaya, Juruna et Arara. Si tous les recours pacifiques juridiques s’épuisent, les chefs disent que ce sera la guerre.
BELO MONTE : le chantier d'un "nouveau paradigme" où le sang coule et la violence domine
Près d'Altamira, dans l'Etat du Para, la construction de la centrale hydroélectrique de Belo Monte a commencé en 2011 et se poursuit dans la violence. Le fleuve Xingu se teinte déjà de rouge et devient insalubre. Antonia Melo, la porte-parole du Mouvement Xingu Vivo Para Sempre qui réunit riverains et indigènes du Bassin du Rio Xingu, a affirmé que la construction du barrage provoque le chaos social dans la région d'Altamira, ville proche du barrage, indiquant une augmentation exponentielle de la violence.
De fait le mouvement migratoire occasionné par cet ouvrage est la cause d’une augmentation de la violence dans les 11 municipalités directement concernées par la centrale hydroélectrique : trafic de drogues, viols, menaces, port illégal d'arme, flagrants délits et agressions aux personnes connaissent une envolée dans les statistiques policières. La peur gagne la population et les commerçants d’Altamira, la plus importante ville de la zone de Belo Monte. Cette agglomération de 100.000 habitants a vu, entre 2010 et 2011, le nombre de délits croître de 62% et la quantité d’armes saisies de 379%, d’après les chiffres de la police civile du Xingu.
De nombreuses manifestations ont eu lieu depuis le démarrage des travaux. La première fut l'occupation du chantier et d'une route d'accès, une partie de la journée du 27 octobre 2011, par plusieurs centaines d'indigènes, de pêcheurs, de riverains et d'agriculteurs. Très vite une décision de justice a ordonné le départ des occupants.
Le 31 octobre 2011, Megaron Txucarramãe, l'un des leaders Kayapó les plus charismatiques et influents (neveu du Cacique Raoni), coordinateur régional de la FUNAI (Fondation Nationale de l'Indien, l'équivalent d'un ministère dédié aux populations indigènes du pays) à Colider (Mato Grosso) a été démis de sa fonction, un poste qu'il occupait depuis 1995. Megaron affirme que son éviction est due à son opposition à la construction d'usines hydroélectriques programmées par le gouvernement, dont celle de Belo Monte. Questionné par la Folha de São Paulo, le directeur de la FUNAI n'a pas souhaité commenter la décision qui, selon la Fondation, n'est pas liée à Belo Monte.
Après Rio + 20 qui a réunit plus de 1800 indiens contre l’industrialisation de l’Amazonie, le barrage de Belo Monte a été occupé pendant plusieurs semaines par des autochtones en colère. Certains sont fondamentalement contre la construction du barrage. D’autres sont insatisfaits de l’accord passé avec Norte Energia qui ne remplit pas ses promesses de dédommagement et de relogement des personnes déplacées.
Parallèlement, des attaques violentes à répétition se sont produites dans les Etats du Para et du Mato Grosso do Sul où vivent une majorité de peuples autochtones. De nombreuses ONG ne cessent de dénoncer les persécutions commises à l’encontre des peuples défendant leur terre et leur accès à l’eau.
Le CIMI (Conselho Indigenista Missionário), ONG brésilienne, avait déjà publié un rapport sur les violences perpétrées contre les peuples indigènes au Brésil en 2011, faisant état de plus de 1700 actes de violences contre des personnes dont 60 assassinats, notamment dans l’Etat du Mato Grosso do Sul mais aussi dans l’Etat du Para où s’implanterait le projet de Belo Monte. Pour exemple, Raimundo Anilton Alves da Silva du peuple Tembé, qui a été assassiné en juin 2010, ou encore les défenseurs de l'environnement José Cláudio Ribeiro da Silva et sa femme Maria do Espírito Santo da Silva, abattus par deux hommes armés après avoir été pris dans une embuscade. Des menaces directes ont aussi été reçues par les leaders indigènes de différentes tribus à Altamira lors d’une rencontre avec la firme Electronorte en charge du projet de Belo Monte en juin 2010.
Récemment encore, en novembre 2011, Sheyla Juruna, activiste indigène, fut violemment agressée. D’autres projets industriels au Mato Grosso do Sul, telle que les plantations de sucre de canne sur les terres Guarani, ont aussi engendré des menaces et meurtres de leaders Guarani-Kaiowá, comme Nisio Gomes tué en Novembre 2011. Ces exemples confirment que la situation de violence contre les défenseurs des droits des peuples continue.
Planète Amazone a alerté le Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU au sujet de ces violences par une déclaration, écrite conjointement avec la Fondation France Libertés, remise le 23 février 2012 pour être étudiée en Assemblée lors de la 19ème session.
Les conditions de travail sont aussi extrêmement dures sur le chantier de Belo Monte. Dès le mois de novembre 2011, des grèves se sont multipliées. A chaque fois, des ouvriers sont mis à pied et licenciés : 141 en novembre, 80 en décembre. La dernière grève a réuni, en avril 2012, 7.000 ouvriers qui ont subi une répression musclée des forces militaires. Certains journalistes témoins sur place comparent les conditions de travail des ouvriers à celles de travaux forcés : horaires de travail, conditions de logement insalubres, retards de paie, attente une journée entière au soleil et sans manger pour être payés, encadrement militaire…
BELO MONTE : la France et l'Europe, partenaires de la honte par le biais de leurs entreprises
Belo Monte : pétition du Cacique Raoni
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GDF Suez, EDF, Alstom, Voith-Siemens and Andritz et Arcadis sont des entreprises françaises, allemandes, autrichienne et hollandaises impliquées dans les projets de barrages du bassin amazonien et dont l’Etat est parfois actionnaire majoritaire. Elles prônent un respect des normes internationales ISO pour les entreprises, les gouvernements et les sociétés. Elles ont par exemple adhéré aux normes ISO 9001 et 14001. Il semble urgent de le leur rappeler et de le faire savoir aux autorités nationales dont elles dépendent.
L’ISO 9001 garantit des systèmes de management de qualité. L'ISO 14001:2004 spécifie les exigences relatives à un système de management environnemental permettant à un organisme de développer et de mettre en oeuvre une politique et des objectifs, qui prennent en compte les exigences légales et les autres exigences auxquelles l'organisme a souscrit et les informations relatives aux aspects environnementaux significatifs.
Il est particulièrement étonnant d’apprendre que GDF-Suez via sa filiale brésilienne LEME a été en charge des études d’impact environnemental tant décriées du barrage de Belo Monte.
L’Etat français est actionnaire à 36% de GDF-SUEZ et accompagne à l’heure actuelle un partenariat stratégique entre GDF SUEZ et Electrobas pour l’Amérique latine mais aussi l’Afrique, deux grandes zones émergentes sur lesquelles ces géants de l’énergie cherchent à se développer.
Le Ministère de la Coopération français a octroyé en 2011 un prêt de 100 millions d’euros à l’entreprise publique brésilienne Electrobras qui, via sa filiale Norte Energia, est en charge de la construction du barrage de Belo Monte. Ce prêt entend financer un appui technique pour la gestion durable des forêts en Amazonie. Ceci fait probablement écho à la déclaration de Carlos Minc, Ministre brésilien de l’Environnement qui réclame 800 millions de dollars de compensations aux entreprises engagées sur Belo Monte, notamment pour la préservation des terres autochtones.
Parallèlement, GDF SUEZ est actionnaire à 50,1% de la construction du barrage de Jirau au Brésil et est aujourd’hui le premier producteur privé d’électricité du Brésil, par l’exploitation de 21 centrales, dont 13 hydroélectriques. Jirau est le deuxième plus grand programme hydroélectrique en cours dans les Amériques, après celui de Belo Monte.
Pour son rôle dans la construction du barrage de Jirau, GDF SUEZ a été nominée au Public Eye Awards 2010 couronnant l’entreprise la plus irresponsable en matière d’environnement. L’entreprise est accusée d’avoir fait preuve d’un manque de vigilance au cours des phases de planification et de construction du barrage, ainsi que d’un flagrant mépris des droits humains et de la protection de l’environnement, qui relèvent de la responsabilité juridique et éthique de l’entreprise Electrobas a remporté l'appel d'offre pour la construction du barrage de Belo Monte. Dans le consortium qu’elle dirige, des entreprises françaises comme ALSTOM sont partie-prenantes. Alstom, via sa filiale brésilienne ALSTOM Hydro Energia Brasil Ltda a signé plusieurs contrats avec l’Etat Brésilien dans le secteur des transports, sur le marché de l’eau (assainissement, irrigation), dans l'énergie thermique, hydraulique et éolienne. Alstom fournira les turbines du complexe de barrages de Belo Monte pour un contrat juteux de 500 millions d’euros.
Alstom affirme, dans son code éthique, intégrer l’impact sur l’environnement dans les critères de ses décisions importantes.
Alstom, dans son code éthique, affirme aussi qu’il respecte les cultures des communautés avec lesquelles il interagit et prend en compte les attentes des différentes parties prenantes.
Alstom affirme enfin que sa réputation d’intégrité se construit sur le respect des lois, des réglementations et autres obligations en vigueur, quelque soit le pays où l’entreprise est établie ; De ce fait, il est fortement contestable qu’Alstom s’associe avec le Brésil pour construire un barrage qui viole tous les principes érigés dans son code éthique.
La compagnie française Alstom est le plus grand constructeur mondial de grands barrages. Elle opère dans les barrages de Bakun en Malaisie, Yusufeli en Turquie, Maheshwar en Inde et les Trois Gorges en Chine. L’Etat français a détenu jusqu’à 21% de son capital, dont les parts ont été rachetées en 2006 par le groupe Bouygues. Bouygues détient aujourd’hui 30% du capital d’Alstom.
EDF, dont l’Etat est actionnaire à 85%, dit aussi mener à l’heure actuelle des études sur la construction de barrages hydroélectriques au Brésil et a un oeil sur ses projets nucléaires. « Si le Brésil confirme son plan nucléaire, EDF est prête à apporter ses compétences », a indiqué Patrick Simon, Directeur général de UTE Norte Fluminense, filiale brésilienne d'EDF dont EDF détient 90% du capital.
Que penser de l’industrie française prêtant main forte à la destruction de l’Amazonie et de ses peuples en violant ses propres chartes éthiques ? De plus, ces entreprises semblent refuser d’appliquer les principes définis par la Commission mondiale des barrages dont elles font pourtant partie.
La Commission Mondiale des Barrages dans son rapport publié en 2000 a en effet dénoncé les impacts de ces grands barrages sur les populations autochtones dépendant de la rivière pour vivre. Cet organisme international indépendant constitué des gouvernements, de l’industrie, des académies et de la société civile a énoncé des directives quant aux bonnes pratiques pour l’hydro-industrie. Ces directives reconnaissent les droits fondamentaux et environnementaux des personnes vivant dans les communautés affectées par les barrages.
Au niveau national, l'ONG française Planète Amazone a demandé à travers un appel solennel remis à François Hollande lors de Rio +20 de ne plus engager la France dans des projets industriels irrespectueux du Droit International. Elle s’est appuyée sur la légitimité de la pétition contre Belo Monte lancée par le Cacique Raoni qui a réunit près de 430 000 signatures.
BELO MONTE : le rôle des banques
Il est édifiant de constater que la Banque Mondiale se soit associée par le passé au projet de Belo Monte tout en édictant des bonnes pratiques concernant le respect de la Convention n°169 de l'OIT(Organisation Internationale du Travail - Institution spécialisée des Nations Unies). En 1989, les Kayapó avaient organisé une manifestation massive à Altamira contre le projet d’une série de barrages sur le Xingu. Ils étaient parvenus à convaincre la Banque mondiale d’annuler le financement du projet qui a finalement dû être stoppé.
En ce qui concerne la Banque Mondiale, le 25 janvier 2011, plus de 40 organisations brésiliennes et latino-américaines de la société civile ont remis en cause sa décision d’approuver un déboursement de $500 millions sur un prêt environnemental de politique sectorielle au Brésil en dépit d'un manque alarmant de preuves concernant sa conformité aux conditions de prêt. Les critiques principales de la lettre concernent un manque de preuves au sujet de l'exécution de nouvelles sauvegardes sociales et environnementales par la BNDES, la plus grande banque publique au Brésil, qui finance entre autres Belo Monte. La lettre de la société civile conclut que l'état actuel des décisions de la Banque Mondiale contredit sa politique opérationnelle et d'autres normes concernant la transparence et la révélation de risques. Elle demande que les directeurs exécutifs de la banque mondiale abordent ces questions clé avant l'approbation d’une deuxième tranche de financement.
Le 25 octobre 2011, de nombreuses organisations de la société civile ont adressé une note aux banques intéressées par le financement de l'ouvrage les alertant sur les risques qu'elles encourent.
Lors de Rio +20, une nouvelle manifestation fut organisée le 19 juin 2012 par les communautés autochtones devant la BNDES. Elle a réuni plusieurs centaines de personnes.
Un autre paradoxe à dénoncer est l’attitude de la BNDES qui, tout en investissant dans des projets de grands barrages qui participent activement à la destruction de la forêt vierge, fait part de sa participation à la création d’un fonds de sauvegarde pour la tribu Kayapó. La banque, via son fonds de soutien aux initiatives de conservation et de gestion durable de la forêt amazonienne, dit soutenir ce projet à hauteur de 4 millions de dollars ; le fonds sera lui géré par une organisation nommée Conservation International.
BELO MONTE : le prétexte de l'énergie, la réalité des dommages collatéraux
L’industrialisation de l’Amazonie est une catastrophe écologique annoncée. La France y participe et cette politique est en contradiction directe avec les engagements qu'elle a pris durant le Sommet de la Terre de Johannesburg, mais aussi en contradiction avec les directives agréées au sein de la Commission Mondiale sur les Barrages. Quant au barrage de Belo Monte, qui va la favoriser, penchons-nous un instant sur sa prétendue efficacité en matière de fourniture d'énergie civile propre.
L’électricité produite par le barrage devrait être employée à 30% pour développer, extraire et raffiner les dépôts de minerai du Brésil, engendrant à sa suite d’autres conséquences environnementales liées à l’exploitation des mines.
De plus ce barrage est voué à devenir le barrage le plus inefficace jamais construit au Brésil : afin de - soi-disant - préserver la région, la superficie du lac de retenue a été réduit des 1225 km2 initiaux à 516 km2. Résultat, la capacité installée sera de 11’000 mégawatts au lieu des 15’000 prévus. Il n’est désormais pas sûr que l’ouvrage couvre ses coûts. Le secteur privé rechigne donc à investir et c’est finalement un consortium dominé par des entreprises publiques qui va assumer la dépense.
Le gouvernement estime le coût du barrage à 11 milliards de dollars, alors que les analystes industriels estiment que sa construction, très difficile, coûtera entre 19 et 30 milliards de dollars.
Sa moyenne de production n’atteindra que 39% à l’année. Pendant les mois de saison sèche de juillet à octobre, son efficacité se réduirait à 10% produisant par conséquent seulement 1 123 MW. Il faudra compenser cette baisse de production sur le réseau par le recours à des centrales thermiques. Un paradoxe absolu, note José Goldemberg, un des plus grands spécialistes de la politique énergétique du Brésil, puisque les centrales thermiques émettent justement le gaz à effet de serre qui contribue à détruire la forêt amazonienne qu’on a cherché à préserver en diminuant le volume du bassin d’accumulation !
Cette perte de rentabilité devrait entraîner des décisions de construction de réservoirs supplémentaires afin que l’eau puisse couler en permanence en amont. Le barrage est l'un des 60 barrages que le gouvernement espère en fait construire dans les 20 prochaines années sur le bassin Amazonien.
En 2004, 92% de l’énergie électrique produite au Brésil était d’origine hydroélectrique. Il existait plus de 2000 barrages au Brésil, les 2/3 du potentiel de production se trouvant dans la région amazonienne. Toujours en 2004, le Brésil comptait 112 usines hydroélectriques, pour seulement 22 usines thermiques d’une production supérieure ou égale à 30 MW.
On estime que durant les dix premières années de Belo Monte, 112 millions de tonnes métriques de dioxyde de carbone seront émis par la construction. Ce dioxyde de carbone sera converti en méthane par la forêt en décomposition dans les réservoirs, le méthane étant un gaz à effet de serre 25 fois plus dangereux que le CO2. Les études montrent que la quantité d'émission de carbone par un barrage au Brésil est égale à celle émises par une exploitation pétrolière.
L’approvisionnement en eau du peuple Juruna va être coupé. Des espèces piscicoles présentes seulement en Amazonie seront sérieusement menacées par le barrage. La végétation sera réduite dans le secteur et la qualité de l'eau changera. Les populations autochtones devraient donc particulièrement souffrir d’un manque de ressources vivrières.
Le savoir botanique des peuples de la forêt est extrêmement développé sur la plupart des espèces végétales dont recèle leur territoire. Ces savoirs utiles à l’humanité toute entière sont aujourd’hui menacés.
Pourtant, les « savoirs, innovations et pratiques des communautés autochtones et locales » sont pris en compte dans la définition et la mise en oeuvre d’un développement durable à l’échelle internationale, comme le prône l’article "8j" de la Convention de la diversité biologique, dont le Brésil est signataire. Ils devraient donc être protégés.
Le barrage de Belo Monte pourrait s'avérer être la construction la plus dévastatrice dans l'histoire de l’Amazonie.
Les Brésiliens peuvent sauver 40% de leur consommation annuelle d'électricité d’ici 2020 par une meilleure gestion énergétique et un meilleur entretien des barrages existants selon le WWF dans son rapport de 2007. Le gouvernement pourrait à la place se concentrer sur d’autres alternatives, comme l’éolien et le solaire qui offrirait des alternatives plus écologiques et pourraient s'avérer plus efficaces. « La position du gouvernement brésilien sur Belo Monte va à l'encontre de son rôle central autour de la conférence de l'ONU sur le développement durable (Rio +20) en 2012, » nous rappelle Astrid Puentes, codirectrice de l'association interaméricaine pour la défense environnementale (AIDA).
Ainsi pouvons nous être indignés de constater à quel point certains pays, dont la France, prêtent main forte au gouvernement de Dilma Rousseff dans sa volonté implacable de développer le potentiel énergétique de l’Amazonie quoiqu’il en coûte sur un plan environnemental, climatique, social et juridique.
BELO MONTE : un moyen de viabiliser définitivement les activités minières en terres indigènes
On peut commencer cette histoire par l’Étude d’Impact Environnemental/Rapport d’Impact Environnemental (EIA/RIMA) de Belo Monte dans le chapitre qui traite des droits d’exploitation minière dans la Grande Boucle du Xingu. On y apprend que 18 entreprises, parmi elles, la Compagnie Vale do Rio Doce (demande d’exploitation de l’or), ont fait des demandes d’autorisation de recherche, 7 entreprises ont déjà obtenu cette autorisation et une entreprise détient une concession d’exploitation (CVRD pour l’extraction d’étain), dans la région où Belo Monte est en train d’être construit.
C’était, à l’époque de la réalisation des études environnementales, 70 processus ayant une incidence sur les terres indigènes d’une superficie de 773 000 hectares, desquels 496 373 sont la cible de l’extraction minière, soit 63% du territoire indigène. Des entreprises comme la Compagnie Vale do Rio Doce, Samaúma Exportation et Importation Ltd, Joel de Souza Pinto, Minération Capoeirana, Minération Guariba et Minération Nayara ont des titres miniers dans les Terre Indigène Apyterewa. Mais il y a encore beaucoup plus.
Indépendamment des règles qui régissent le secteur minier jusqu’à aujourd’hui au Brésil, le gouvernement prétend autoriser l’extraction de minerais – principalement or et diamant – en terres indigènes. Ces dernières années ont vu la découverte de gisements de bauxite, kaolin, manganèse, or, cassitérite, cuivre, nickel, niobium, uranium parmi les métaux nobles, dans toute la région du fleuve Xingu. Cela est très clair lorsque l’on observe les cartes des droits miniers présentées dans les études des projets de Belo Monte et des complexes Teles Pires et Tapajós.
Les stratèges militaires défendent depuis des décennies le contrôle des gisements et de leur exploitation par le Brésil afin d’éviter que les Terres Indigènes deviennent des territoires clos et inaccessibles, ce qui empêcherait l’exploitation, à l’exemple de ce qui se produit aujourd’hui avec la Réserve Yanomami. Sur les terres indigènes de la région du Xingu proches du chantier de Belo Monte, il y a une concentration de demandes d’autorisation de recherche et d’exploitation de minerais nobles tels que l’or, le diamant, le niobium, le cuivre, le phosphore, le phosphate.
L’implantation du projet de l’usine hydro-électrique de Belo Monte est le moyen de viabiliser définitivement l’exploitation minière dans les terres indigènes et dans les zones qui les entourent, en particulier dans la Grande Boucle (Volta Grande), un tronçon du fleuve de plus de 100 km qui va pratiquement être asséché par le détournement des eaux du Xingu. Et c’est justement à proximité du barrage principal, sur le site dit de Pimentel, qu’est en train d’être implanté le plus grand projet d’exploitation d’or du Brésil, qui va profiter du fait que la Grande Boucle sera sèche durant des mois chaque année par le détournement des eaux du fleuve.
Depuis plus de deux mois, le Rapport d’Impact Environnemental (RIMA) du projet Grande Boucle de l’entreprise canadienne Belo Sun Mining Corp daté de juin 2012 est disponible sur internet. L’étude défend les avantages de l’exploitation minière à ciel ouvert pour le traitement du minerai d’or avec « une technologie et des équipements de pointe, similaires aux autres projets dans l’état du Pará ».
On trouve quelques perles dans le RIMA du Projet Grande Boucle : « les Plans de Développement du gouvernement fédéral et du gouvernement du Pará, pour la région du Projet Grande Boucle, précisent la nécessité d’investissements en infrastructure, dans l’enseignement primaire, la santé et d’autres aspects qui permettent d’améliorer les indicateurs de développement social et économique de la région, ainsi que d’améliorer la qualité de vie de ses populations de manière plus égalitaire et soutenable ».
Légende : des employés de l’entreprise canadienne font connaissance avec le territoire où ils prétendent extraire de l’or.
Il est incroyable que, outre les usines hydro-électriques, les projets miniers, dans l’optique des gouvernements fédéral et du Pará, soient devenus la panacée pour résoudre tous les problèmes de développement social. Un rôle qui est une obligation de l’État, avec l’argent des impôts payés par les citoyens.
De plus, selon l’étude présentée par la Belo Sun Mining Corp, l’investissement total dans ce projet minier de l’or de la Grande Boucle sera de 1.076.724.000,00 $ US (830.405.822,78 EUR) et l’entreprise prétend, en « cadeau », mettre en place un suivi et un contrôle environnemental et social et collaborer à la réalisation du développement social, économique et environnemental de la région. La durée de viabilité du projet est estimée à 12 ans en accord avec les études déjà effectuées.
N’est-ce pas merveilleux ?
Mais dans le RIMA (nous avons aussi eu accès au EIA) il manque quelques éclaircissements : aucune mention des indigènes de la région, ni du fait que le chantier de Belo Monte facilitera le projet Grande Boucle, ni même une explication sur le fait que le Secrétariat de l’Environnement du Pará délivre une autorisation alors que cela est de la compétence de l’IBAMA (Institut Brésilien de l’Environnement). Il y a 106 processus d’autorisation d’exploitation minière – or, bauxite, diamant, cassitérite, manganèse, fer, cuivre, sable, granit – répertoriés sur le site de l’Ibama, dont 30 ne sont pas dans l’état du Pará. Alors pourquoi cette autorisation a-t-elle échappé à l’analyse des techniciens de l’Ibama ? Les impacts environnementaux du projet Belo Sun Mining sur la biodiversité atteindront principalement la qualité des eaux superficielles et souterraines – ensablement des cours d’eau -, ce qui ajoute à la région un facteur d’agravement du préjudice causé aux communautés indigènes de la Grande Boucle et de la rivière Bacajá, qui sont déjà confrontées à ce problème causé par le chantier de Belo Monte. Sans parler du précédent qui va ouvrir les portes à l’exploitation d’autres gisements.
Les Indiens isolés dans la zone du projet de la Belo Sun Mining
La présence d’indigènes en isolement volontaire dans la région du fleuve Xingu et de la rivière Bacajá est connue depuis les années 1970. Il existe des études et des témoignages qui prouvent la présence d’un ou de plusieurs groupes isolés sur la Terre Indigène Koatinemo, autour des sources de l’igarapé Ipiaçava. Des témoignages recueillis en 2008 confirment la présence d’indigènes en isolement volontaire. Les Asurini ont relaté leur rencontre avec des isolés, après une expédition de chasse aux alentours des sources de l’igarapé Ipiaçava.
Le projet Grande Boucle de la Belo Sun Mining Corp se situe en partie dans les zones de déambulation de ces groupes en isolement volontaire. L’Étude d’Impact Environnemental (EIA) de Belo Monte, Composantes Indigène, a reconnu la présence d’indigènes en isolement volontaire autour des sources de l’igarapé Ipiaçava et dans la Terre Indigène Koatinemo des Asurini. Dans un rapport technique, la Funai fait référence aux impacts qui pourraient affecter les indigènes en isolement volontaire et observe que les actions des « grileiros » (traficants de terres – NDT) et des envahisseurs vont menacer leur intégrité physique et culturelle.
Cet avis de la Funai alerte aussi sur le fait que le détournement des eaux et la réduction du débit du fleuve Xingu sur le tronçon de la Grande Boucle peut générer des effets en chaîne sur l’ichtyofaune (faune aquatique – NDT) dans les forêts inondables qui margent le fleuve ; le mouvement migratoire va créer une augmentation démographique dans la région et va provoquer une forte pression sur les ressources naturelles ; cette pression entrainera des invasions des terres indigènes dans lesquelles déambulent les groupes d’indigènes en isolement volontaire.
La Funai avait aussi proposé qu’avant l’appel d’offre d’avril 2010, le pouvoir public coordonne et articule les actions pour la protection des indigènes en isolement volontaire. Pour cela, il était nécessaire de publier une Ordonnance de Restriction de l’Utilisation des Terres Indigènes Trincheira Bacajá et Koatinemo.
Le 11 janvier 2011, la Funai a finalement réussi à publier l’Ordonnance de Restriction nº38 qui établit le droit d’accès, de déplacement et de permanence de personnes étrangères à la Funai dans la zone décrite pour une durée de 2 ans à partir de la date de publication. La zone décrite dans cette Ordonnance, terre Indigène Ituna/Itatá, est localisée dans les municipalités de Altamira, Senador José Porfírio et Anapu, dans l’état du Pará, et a une superficie approximative de 137 765 hectares et un périmètre évalué à 207,2 km (voir la carte). Le projet Grande Boucle de la Belo Sun Mining Corp. est implanté dans la municipalité de Senador José Porfírio, dans la zone de l’Ordonnance 38 de la Funai qui avait pour objectif la protection des groupes isolés. Lors d’une conversation sur cette Ordonnance, valide jusqu’à décembre 2012, avec un fonctionnaire de la Funai qui n’a pas souhaité être identifié, il a affirmé qu’il devait, d’ici à la fin de l’année, écrire un nouveau justificatif pour sa réédition et qu’il avait besoin de plus d’informations sur le projet Grande Boucle ainsi que sur d’autres prévus dans la région. De plus, selon lui, il existe des témoignages plus récents sur la présence d’Indiens isolés et la Funai traite la région décrite dans l’Ordonnance nº38 comme une priorité. La Funai a rencontré d’énormes difficultés, a fait et continue à faire de nombreuses études sur cette zone avec 6 expéditions réalisées depuis un an, conclut-il.
L’Audience Publique pour « présenter » le projet Grande Boucle de la Belo Sun Mining Corp. à la population est prévue pour le 13 septembre.
Belo Sun Mining Corp.
L’entreprise responsable au Brésil du projet Grande Boucle est la Belo Sun Mineration Ltd, filiale brésilienne de l’entreprise canadienne Belo Sun Mining Corporation qui appartient au groupe Forbes & Manhattan Inc., une banque mercantile de capital privé tournée vers des projets miniers dans le monde entier. La Belo Sun Mining Corp. est entrée dans la bourse de valeur de Toronto le 30 avril 2012 dans un climat de fête et de commémoration. Dans son site très actualisé, l’entreprise ne cache pas ses prétentions d’exploitation minière en Amazonie, ni qu’elle possède un portefeuille de propriétés au Brésil. L’objectif principal de la Belo Sun est l’exploitation minière dans une zone qui est, affirme-t-elle, à 100% de sa propriété et qui dispose d’approximativement 2,85 millions d’onces d’or. Lorsque l’on lit les divers documents, on comprend la raison d’un tel enthousiasme et pourquoi le projet Grande Boucle est si précieux pour la Belo Sun, car elle contrôle les droits d’exploitation minière sur une zone de 130 541 hectares (1305 km²). De quelle façon cela a-t-il été possible, cela reste à être étudié, car durant quelques temps les équipes de la compagnie ont agi ouvertement dans la Grande Boucle du Xingu, réalisant des perforations et rédigeant au secrétariat de l’environnement de l’état du Pará le processus d’autorisation environnemental. Le riche matériel photographique disponible sur le site donne la désagréable sensation qu’un puissant pouvoir est derrière ce juteux projet milliardaire. Un autre projet, Patrocíno, dans la région du Tapajós, lui aussi de la Belo Sun Mining Corp., est en développement et mérite un chapitre à part.
Bien que l’entreprise ait informé dans les études environnementales qu’il s’agit d’une exploitation d’un gisement proche de la superficie, dans des conditions géologiques favorables, avec une extraction à ciel ouvert, dans son site elle se réfère à l’existence d’un potentiel de haute qualité à une profondeur d’au moins 200 ou 300 mètres. Il semble que rien n’ait été laissé de côté dans le projet et que la construction du barrage principal de Belo Monte, au sitio Pimental, pour dévier le fleuve précisément sur le tronçon de la Grande Boucle va faciliter l’extraction de l’or à grande profondeur.
Un autre détail qui attire l’attention sur la Belo Sun Mining Corp. est que, dans les documents rendus disponibles, la référence à la compagnie a été altérée et le symbole, dans la structure du capital de l’entreprise, est représenté comme TSX:BSX. Dans une note de 2011, le Brasil Econômico fait référence à Belo Sun et à l’extraction de 4 millions d’onces troy (barre de 31,1 grammes) à Altamira, Pará, et indique l’entrepreneur Eike Batista comme un investisseur potentiel en raison de ses liens avec la région dans laquelle il exploita l’or entre 1980 et 1990. Cela commence à avoir un sens. Peut être Eike Batista est-il le grand investisseur de la Belo Sun Mining Ltd, filiale de la Belo Sun Mining Corp ?
L’exploitation minière au Brésil
En mai 2011, le gouvernement a divulgué le Plan National de Minération (PNM) 2030, avec l’objectif mal expliqué que le secteur minier contribuerait à un Brésil soutenable (durable). Ce sont les mots utilisés dans l’introduction faite par le ministre des mines et énergie, Edison Lobão.
La prétention de présenter une vision du futur basée sur le développement du secteur minier brésilien avec un objectif stratégique de soutenabilité est pour le moins offensive. La justification que le PNM utilise pour anticiper l’idée est qu’il y aura une plus forte pression sur l’utilisation et l’occupation des sols et que la demande de minerais par les pays émergents devrait croître lors des prochaines décennies.
Les zones qualifiées de Restriction Légale, que sont les unités de conservation, les terres indigènes, les Terres Quilombolas, les zones destinées à la réforme agraire, sont considérées comme un frein à l’expansion de l’activité minière. Un exemple cité dans le PMN, comme une introduction pour amener le lecteur à comprendre la nécessité d’une exploitation minière dans les zones de restriction légale, est le plan de gestion, considéré comme un véritable obstacle à la pratique des "activités économiques".
Les terres Indigènes sont elles aussi considérées comme des restrictions à l’activité minière car elle empêchent que plus de 25% de l’Amazonie Légale et 12% du territoire national soient exploités. L’article 231, § 3º, de la Constitution Fédérale de 1988 est compris comme étant passible de réglementation car il prévoit que la recherche et l’exploitation des richesses minérales en terres indigènes soient possibles après approbation du Congrès National, à condition que les communautés affectées soient entendues, et que leur soit assurée une participation aux résultats de l’exploitation. Comme la loi n’a pas été réglementée, le PNM lui attribue une certaine inconvénience pour la réalisation des plans d’exploitation dans ces zones.
Réglementer l’article 231 de la Constitution Fédérale devient dès lors pour le PNM un défi pour qu’à l’avenir puisse être défini la relation entre l’activité minière et les communautés indigènes. L’articulation présuppose une amélioration de la connaissance géologique du Brésil pour faciliter l’identification de nouveaux gisements et, ce qui est pire, une plus grande autonomie de l’État pour la fourniture d’intrants minéraux pour le secteur agricole. Sans aucune pudeur, le PNM expose l’objectif clair d’obtenir, par la réglementation, la permission « d’ouvrir des mines en terres indigènes », ce qui « élargit la portée de l’activité du secteur (minier) dans la région Nord ».
Il n’est pas surprenant que même un rôle stratégique pour la conservation des forêts ait été attribué au secteur minier, sans aucun éclaircissement sur la manière de procéder en pleine Amazonie. L’exploitation de l’uranium est aussi conçue de manière inquiétante, considérée comme le moyen préférentiel de production d’une énergie qui réduit la production de gaz à effets de serre. Son exploitation en Amazonie sous entend dans les terres indigènes et dans les unités de conservation !
L’exploitation minière en Amazonie est présentée comme l’actuelle frontière de l’expansion minière, et est considérée avec optimisme dans le texte, vu la floraison des grands projets en cours depuis le XXº siècle. Tous les projets dont les impacts sont très largement connus sont cités : la bauxite de Juruti ; le manganèse de Serra do Navio (Amapá) ; la bauxite de Rio Trombetas, Paragominas ; l’étain de Pitinga (Amazonas) et de Rondonia ; le fer, le manganèse, le cuivre et le nickel de Carajás (Pará) ; le kaolin de Jari (Amapa) et du bassin de la rivière Capim (Pará) ; l’alumine et l’aluminium de Barcarena (Pará) ; l’écoulement de la fonte par la voie ferrée de Carajás.
Tout le plan permet d’entrevoir un grand et unique processus d’exploitation minière en Amazonie, précédé par la destruction imposée par les projets hydro-électriques et de voies fluviales. L’exploitation du grand potentiel minéral en Amazonie, spécialement en terres indigènes, est en cours, du moins sur le papier et au Congrès National, ponctué dans les plans du gouvernement fédéral par des projets significatifs pour faciliter la connaissance géologique du Brésil. Dans la région amazonienne, 5% de la zone qui devra être étudiée pour accroître les connaissances géologiques correspond à des terres indigènes et le document a établi des directrices pour l’exploitation minière dans les zones de restriction légale. Parmi ces directrices, la connaissance du sous-sol pour pouvoir prendre les décisions en adéquation avec les « intérêts nationaux, régionaux ou locaux. » Ce qui signifie dans la pratique que, bien que la définition de l’accès et de l’utilisation des terres indigènes soit très claire dans la Constitution de 1988, un agenda d’arrangements va permettre la réglementation en cours au Congrès, et ainsi viabiliser l’exploitation minière en terres indigènes et quilombolas. Tout cela au nom de l’intérêt national.
Le PNM propose deux actions relatives aux zones de restriction légale pour éliminer les entraves au développement de l’activité minière : l’une est l’articulation des organismes compétents pour l’utilisation et l’occupation des sols restreignant l’activité minière (environnement, terres indigènes et quilombolas, zones de réforme agraire, sites archéologiques et fossilifères, entre autres) ; l’autre est de soutenir l’adoption d’une loi réglementant l’exploitation des ressources minérales dans les terres indigènes, comme le prévoit l’article 231 de la Constitution de 1988.
Le projet de loi sur l’activité minière
Il est de la compétence exclusive du Congrès National « d’autoriser, en terres indigènes, l’exploitation et l’utilisation des ressources hydriques et la recherche et l’exploitation des richesses minérales », article 49, paragraphe XVI de la Constitution fédérale. Les richesses minérales ont toujours été d’intérêt national et économique, mais très éloignées de la préservation environnementale et des intérêts des populations indigènes.
Est à l’étude au Congrès National le Projet de Loi (PL) nº 1610/96 qui prétend réglementer l’exploitation des ressources minérales en terres indigènes et qui subit de grandes pressions pour être approuvé cette année. Un groupe de députés de la Commission Spéciale de l’Activité Minière en Terres Indigènes s’est rendu en Australie pour voir comment ce pays se débrouille pour que les indigènes acceptent l’exploitation minière sur leurs terres. Ils y ont étudié la législation, les contrats, les royalties et la régulation du système d’exploitation minière en terres indigènes outre mer pour élaborer un avis sur le PL 1610.
La marque régulatoire et le nouveau code minier
En 2011, le ministère des mines et énergie (MME) a lancé une discussion sur la nouvelle marque légale de l’exploitation minière brésilienne, et a établi un diagnostic qui incrimine la bureaucratie et une certaine « faiblesse » du pouvoir compétent pour concéder les autorisations comme étant les principaux freins qui touchent ce secteur. Parmi les objectifs proposés par la nouvelle marque légale, se trouvent le renforcement de l’État pour atteindre la souveraineté sur les ressources minérales, une meilleure utilisation des gisements et l’attraction d’investissements pour le secteur minier. Tout indique que les investisseurs sont déjà trouvés.
Il est évident que dans le cadre de cette nouvelle marque légale sur l’activité minière brésilienne, le MME en a profité pour créer le Conseil National de Politique Minière et l’Agence Nationale Minière (ANM), qui, probablement, auront à leurs têtes des personnes de confiance. C’est déjà le cas de l’Entreprise de Recherche Énergétique (EPE), liée à l’Agence Nationale d’Énergie Électrique (Aneel), directement subordonnée au MME.
Les propositions du gouvernement Dilma Rousseff pour altérer le Code Minier de 1967, et pour créer l’Agence Nationale Minière, seront examinées par le Congrès National. Le principal changement dans le Code Minier sera que le gouvernement fera des appels d’offre pour les droits d’exploitation qui sont actuellement délivrés par ordre d’arrivée.
Toutes ces altérations prévues pour le secteur minier au Brésil ne vont cependant pas altérer les autorisations de recherche et d’exploitation de nouveaux gisements déjà concédées par le Département National de production Minière (DNPM). Edison Lobão, le ministre des mines et énergie, a récemment annoncé que les nouvelles autorisations seraient suspendues jusqu’à ce que le nouveau code minier soit approuvé par le Congrès. Tout processus en cours et non conclu par le DNPM perdrait donc, selon le ministre, sa validité et les gisements seraient attribués dans le futur selon les nouvelles normes.
Pour avoir une idée de l’importance des intérêts miniers au Brésil, principalement en Amazonie, il faut savoir qu'il y a plus de 5 mille autorisations de recherche et 55 ordonnances d’exploitation en cours d’approbation au DNPM. Il est logique que les entreprises minières qui sont dans la file d’attente se fassent entendre, d’autant plus qu’elles prennent en considération que la Compensation Financière pour l’Exportation des Ressources Minérales (CFEM) va passer de 0,2% à 6%. Mais, pour le ministère des mines et énergie, tenu par Edison Lobão sous la houlette de José Sarney, l’approbation du code minier augmente son pouvoir, car il deviendra le controleur direct des appels d’offre des concessions, comme celui de l’énergie. Cela est un héritage du gouvernement Lula depuis 2010 que Dilma Rousseff applique aujourd’hui sans plus tarder.
Ce résumé sur les arrangements au sujet des altérations dans le secteur minier sert à expliquer pourquoi de grandes entreprises internationales sont actuellement en train « d’attaquer » les principales régions qui disposent des plus grandes richesses minérales au Brésil. L’une de ces régions est celle où est construite l’usine hydro-électrique de Belo Monte, dans la Grande Boucle du Xingu. Une autre se trouve dans la Province Minière de Tapajós, justement où le gouvernement prévoit la construction du Complexe Hydro-électrique du Tapajós. Coïncidence ou non, les entreprises sont canadiennes et ont divers projets d’exploitation de l’or dans ces zones.
Cam
Source : site officiel du cacique Raoni
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