A la découverte des peuples emberas et wounaan
- Reni Andcam
- 9 juin 2015
- 7 min de lecture

Embera signifie «homme bon» ou «bon ami».
Wounaan signifie “personnes, gens, ou peuples”.
Les Emberas font partie, avec les Wounaams, du groupe d’indigènes appelé Chocos.
Une frontière coupe artificiellement la bio-région de leur territoire en deux.
Côté Panama, on l’appelle le Darien, côté Colombie, le Choco.
Ils sont entrés dans l’isthme autour du XVIIIe siècle, depuis la région du Choco en Colombie.
Des études récentes indiquent que, avant l’arrivée de Christophe Colomb, ces indigènes venaient probablement du Brésil.
A l’égal des cinq autres ethnies présentes au Panama, les Emberas et les Wounaans ont conservé leurs coutumes et traditions.
La société chocó est organisée autour de la communauté familiale, l'homme le plus âgé tenant lieu de chef.
La résidence se déplaçant avec les lieux de culture, hommes et femmes ayant leurs propres terres cultivées, la composition de la communauté familiale fluctue quelque peu.
Les légendes chocó font état de combats avec leurs voisins kuna ainsi que de succès guerriers que les Chocó remportèrent au XVIIe siècle contre les Espagnols.
Les sociétés chocó des forêts tropicales survécurent à l'invasion espagnole car ils ne présentaient que peu d'intérêt économique pour les Européens ; aussi, on les délaissa bientôt et, peu belliqueux, les Chocó ne cherchèrent pas le contact avec les Blancs.
Ils conservent encore nombre de leurs croyances et de leurs pratiques traditionnelles : ils privilégient les médications à composantes magiques (formules et plantes), continuent de subvenir à leurs besoins avec les produits de leurs cultures traditionnelles (manioc et cacao, cultivés dans les clairières) et ignorent tant la langue espagnole que la religion catholique.
En marge de la vie nationale des États dans lesquels ils vivent, les Chocó demeurent entre eux dans la forêt tropicale.
Autant les hommes que les femmes sont presque nus.
Les hommes ont un corps musclé.
Les femmes ont une abondante chevelure noire et portent des boucles d’oreilles.
Les hommes utilisent un couvre sexe ou pagne appelé guayuco (dans leur langue Andia) et une petite jupe faite à la main avec des graines et ces derniers temps avec des perles en plastique (utilisés pour des occasions spéciales) qui s´appelle Ambura dans leur langue.
De nos jours, les hommes portent souvent des chemises et des pantalons ou parfois des shorts selon les travaux qu’ils vont faire.
Les femmes utilisent des jupes avec des tissus faits en chine qui sont peint avec des fleurs et des oiseaux qui rappellent la nature, qui s’appellent des paruma (dans leur langue Gua).
Les choco sont semi-nomades et vivent de façon autonome dans un ou deux petits groupes familiaux.
Ils construisent leurs maisons le long des berges des rivières qui servent comme leurs routes et leurs moyens de subsistance.
Ils habitent des villages faits de huttes rondes.
Leur demeure est une plate-forme sur pilotis, assise sur de gros poteaux, à plusieurs pieds au-dessus du sol.
Ils dorment sur des nattes en écorce d’arbre, ou des hamacs pour les enfants, avec des moustiquaires.
Dans la plupart des régions, la chasse et la pêche sont des activités importantes qui confèrent prestige masculin, en plus de fournir des aliments d'appoint.
La chasse est solitaire, habituellement avec un fusil de chasse et un chien.
Dans les régions montagneuses, la sarbacane et la lance à la pointe empoisonnée est encore une utilisation normale.
Deux types de poisons sont utilisés sur la pointe des flèches des sarbacanes: l’un est un poison végétal connu comme le curare qui affecte le cœur, et l’autre provient d’une espèce de grenouille.
Les espèces chasés les plus courantes sont des gibiers, cerfs, pécaris, tatous, agoutis, singes, et divers oiseaux.
Ils utilisent des techniques différentes pour la pêche: le crochet et la ligne, le harpon, le filet, le poison ” molène ” et, plus récemment, le masque de plongée.
L’agriculture est l’activité principale.
Ils cultivent la banane plantain qui est le produit principale pour leur commerce.
Le maïs, le riz, les tubercules, comme l’igname, le manioc et d’autres, sont aussi cultivés.
Pratiquant une agriculture de type horticole, ils cultivent sur brûlis.
Les femmes font de la poterie en argile, mais à l’heure actuelle cette pratique est en train de disparaître, et aussi de magnifiques vanneries avec la fibre végétale tels que des paniers, des masques, des assiettes, des nattes et des ornements.
Tissés avec des fibres végétales, certains paniers nécessitent plusieurs mois de travail.
Les feuilles des palmiers chunga et nawala sont d'abord ceuillies, puis transformées en fibres au terme d'un long processus.
Selon la palette souhaitée, les chocoe préparent une teinture naturelle à base de roucou (pour le rouge), de jagua (pour le noir), d'une variété de yucca (pour le jaune) ou d'écorces de noix de coco (pour le marron).
Les couleurs obtenues servent ensuite à teindre les fibres, lesquelles sont tressées d'une manière savante pour produire des dessins qui se mêleront à la couleur naturelle de la chunga.
Les motifs géométriques rappellent les peintures corporelles.
Les hommes effectuent des travaux avec le bois comme des pirogues, des bancs, des rames, des couvercles de pot, et travaillent le Tagua (ivoire végétal) produit par le séchage de ses graines, entre autres.
A l'origine prisé par les Indiens pour son lait sucré, le fruit de ce palmier se durcit pour former la noix de tagua.
A sa découverte par les Européens, au cours du XIXème siècle, la noix de tagua fut exploitée en raison de sa grande ressemblance avec l'ivoire animal, plus particulièrement pour la confection de boutons et d'objets d'ornement.
L'armée américaine en équipa même les uniformes de ses soldats.
Puis, l'apparition du plastique signa son arrêt de mort.
Tombée dans l'oubli, la tagua ressuscite aujourd'hui grâce au talent des indiens qui la travaillent.
Ils sont de plus en plus nombreux à sculpter ces noix blanches à carapace marron, qu'ils peignent parfois de couleurs vives, à l’aide d’encres de Chine pour obtenir un maximum de réalisme.
Les pièces peuvent être laissées naturelles.
Elles sont alors de couleur ivoire, vieilli ou pas.
Ils donnent ainsi naissance à de multiples petits animaux et miniatures décoratifs (toucans, singes, colibris ...).
Dans le monde 15 espèces de palmiers produisent l'ivoire végétal.
En Amérique du Sud et Amérique Centrale on trouve les 6 espèces du Phytelephas (du grec Phyton, plante et Elephas, éléphant).
Au Panamá, sur les pentes de la forêt humide, pousse Phytelephas seemannii.
Ce palmier à tronc court d'où émergent de longues palmes en forme d'éventail est appelé ici arbre à tagua (lire tagoüa).
A la différence des autres palmiers l’arbre femelle phytelephas seemannii porte ses fruits près du sol.
De la taille d'un petit ballon chaque fruit est formé par cinq ou six gousses rigides et épineuses contenant chacune de quatre à dix graines de forme et de taille variables.
La graine est constituée d'une coquille rigide sous laquelle une peau marron protége le germe et l'albumen (liquide visqueux et blanc).
Au cours de la maturation, l'albumen s'épaissit peu à peu.
Lorsqu'un fruit est mûr, il se détache du tronc et les gousses éclatent répandant les graines.
Certaines, retenues par des obstacles, vont pouvoir germer et prendre racine, les autres peuvent être récoltées et mises à sécher, l'albumen va alors finir de durcir tout en restant très blanc et donner ainsi l'ivoire végétal.
Ils sont aussi connus pour les paniers élaborés, les sculptures en bois de haute qualité, les cannes de commandement (utilisant le bois fin Cocobolo), les cannes faites sur mesure en fonction de la hiérarchie de la position détenue par le Congrès Général des Embera-Wounaan.
Ils utilisent des pirogues, qu’ils construisent en utilisant les bois: Espavé, cèdre, cèdre l’aubépine et pin jaune.
La vie des Embera – Wounaan se déroule autour des rivières.
Ils utilisent des ânes et des chevaux comme moyen de transport pour se déplacer à l’intérieur de la contrée.
Le tatouage tribal est l’une des plus anciennes traditions des peuples Emberá et Wounaan.
De nos jours, hommes, femmes et enfants arborent ces décorations corporelles à l’occasion de cérémonies ou de fêtes, généralement accompagnées de danses.
Pour réaliser ces dessins géométriques, les Emberá et les Wounaan utilisent les propriétés du jus oxydant tiré du fruit de l’arbre appelé jagua (Genipa americana L. appartenant à la famille des Rubiaceae. : kipar’á en emberá, k’ipaar en wounaan).
Il est très connu pour son fruit depuis le temps des Incas.
On le trouve dans la forêt équatoriale humide, sur le continent entre le Mexique et le nord du Brésil, ainsi que sur les îles des Caraïbes.
Il est parfois cultivé.
C’est un arbre de petite taille, 15 m environ de hauteur pour un diamètre moyen de 50 cm.
Les feuilles brillantes, de couleur vert foncé sont de forme oblongue et mesurent de 20 à 30 cm de long sur 10 à 15 cm de large.
La chenille d’un Sphinx, Aellopos fadus, s’en nourrit.
Les fleurs, au parfum agréable, présentent 5 pétales de couleur variant entre le blanc et le jaune avec parfois du rouge-brun.
La floraison intervient durant la saison humide, de mai à octobre.
Le fruit est très important dans la tradition des amérindiens.
Il s’agit d’une baie comestible à peau épaisse, de forme ronde ou légèrement ovalisée, mesurant de 5 à 10 cm de diamètre.
Il est présent sur l’arbre toute l’année.
Cueilli, le fruit peut sécher sans pourrir.
Ils utilisent une peinture rouge fabriquée avec du roucou, la gousse orange-rouge qui est utilisé couramment pour donner de la couleur et de la saveur à la cuisine panaméenne.
Ils peuvent avoir une signification traditionnelle, quelquefois indiquer l’appartenance à un groupe ou bien n’avoir qu’un but purement esthétique.
Cette baie a des propriétés nutritives et médicinales, curatives et anti bactériennes.
Les shamans peuvent également utiliser la jagua pour soigner des maladies ou pour chasser les mauvais Esprits.
Le jus est diurétique, calme les douleurs d’estomac ou d’intestins.
La peau et les racines sont aussi utilisées en infusions dans divers traitements, par exemple les bronchites.
Il arrive que l'on voit des tatouages recouvrant entièrement le corps, laissant apparaître peu de parties non colorées.
Des femmes, plus rarement des hommes, couvrent toute la partie basse du visage, à partir de la bouche.
Cette zone du visage est considérée comme particulière (érogène) et que l’on doit s’en tenir éloigné.
Si l’homme arbore ce tatouage en laissant une petite "barbichette" non tatouée, cela veut dire qu’il serait amoureux …
Le fruit est râpé et la pulpe obtenue est pressée pour en extraire un jus.
Celui-ci est appliqué sur l'épiderme avec un petit stick en bois effilé (balsa ou bambou).
Dans certaine villages, c’est une forme de petite fourche à deux pointes.
Il s’agit de peindre, comme avec un pinceau, avec le liquide bleuté, presque incolore, qui pénétrera légèrement, s’oxydera pour réaliser le tatouage bleu-noir au bout de quelques heures.
Cette coloration de la peau est temporaire.
Elle disparaîtra progressivement au bout de 10 à 15 jours avec l’exfoliation naturelle de l’épiderme.
Il faudra recommencer pour la prochaine fête…
Le fruit mûr sera employé pour faire des jus, des confitures (dans les Iles Vierges, il est appelé "marmalade box") et même des liqueurs.
Frotté sur la peau, le fruit sert également de répulsif pour éviter les piqures de moustiques.
Cam
Source : http://www.sagapanama.fr
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